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l’IA générative en entreprise nécessite une approche spécifique
Aborder un projet d’IA générative comme un projet classique d’intelligence artificielle serait une erreur. Même si les bases techniques, comme les réseaux de neurones, sont les mêmes, les usages, les compétences nécessaires et la façon de gérer ces projets en entreprise sont très différents. De plus, l’IA générative n’est pas seulement destinée aux grandes entreprises : les PME peuvent aussi en tirer profit aujourd’hui.
Revenons sur les concepts pour bien en comprendre les enjeux pour l’entreprise.
Le Machine Learning
Le Machine Learning, apparu dans les années 1950 avec des applications comme le jeu de dames d’Arthur Samuel, repose sur des approches mathématiques et statistiques permettant aux machines d’apprendre à partir de données. Aujourd’hui, il est au cœur de nombreuses applications quotidiennes :
- Classification : Identifier les préférences d’utilisateurs selon leurs caractéristiques.
- Prédiction : Estimer des valeurs, comme le prix d’un bien immobilier.
- Clustering : Analyser et segmenter des données non structurées.
Ces applications nécessitent des volumes de données importants, une préparation minutieuse et des compétences avancées en mathématiques et statistiques.
Le Deep Learning
Les réseaux de neurones, théorisés dans les années 1960 sont restés peu utilisés jusqu’aux travaux de Yann Lecun, Geoffrey Hinton et Yoshua Bengio qui ont donné naissance au Deep Learning dans les années 2000.
En 2012, Geoffrey Hinton et son équipe remportent la compétition ImageNet grâce à l’utilisation de cartes graphiques (GPU), propulsant cette technologie dans des domaines comme :
- Le traitement du langage naturel (traduction, résumé automatique).
- La reconnaissance d’images.
- Les moteurs de recommandation (streaming, e-commerce).
Le Deep Learning étend les capacités du Machine Learning en exploitant des modèles complexes et de vastes volumes de données, préparant le terrain pour l’émergence de l’IA générative.
Naissance de l’IA Générative
En 2017, la publication de l’article “Attention Is All You Need” (Vaswani et al.) a été décisive. Il a ouvert la voie à de nouveaux types d’algorithmes d’IA les transformers. Leur principal apport a été de pouvoir analyser les différents composants d’une phrase en parallèle et non plus séquentiellement comme avant. Ce qui a permis notamment des entraînements sur de plus gros volumes de données.
L’année suivante, deux projets majeurs, basés sur ces transformers, ont vu le jour. Google a dévoilé BERT, un modèle axé sur la compréhension du sens des phrases, tandis qu’une jeune société nommée OpenAI entrait dans la course avec GPT (Generative Pre-trained Transformer), axé sur la génération de texte. Les bases de l’IA générative étaient posées.
OpenAI et apparition des LLM
Le véritable coup de génie d’OpenAI résidait dans son ambition d’entraîner des modèles sur des volumes de données massifs : 110 millions de paramètres pour GPT-1 en 2018, 1,5 milliard pour GPT-2, puis 175 milliards avec GPT-3. La première phase s’est appuyée sur des données brutes issues d’Internet, suivie d’un affinement grâce à des retours humains, rendant les modèles capables de converser de manière naturelle.
Cependant, une telle ambition nécessitait une puissance de calcul colossale. Microsoft, avec un investissement d’un milliard de dollars en 2019, a fourni l’infrastructure nécessaire pour transformer cette vision en réalité. Les résultats ont surpris tout le monde, même les leaders établis comme Google.
Basés au départ sur un principe statistique de prédire le mot suivant dans un début de phrase, ces modèles sont capables de proposer des services d’analyse et de génération de texte, tels que : le résumé, la traduction. Mais surtout de répondre à des questions sur les informations qui ont servi à l’entrainement, en l’occurrence, tout ce qui se trouve sur Internet. C’est en quelque sorte une encapsulation de l’intelligence dans une solution technique facile à exploiter.
Le lancement public de ChatGPT en novembre 2022 et son adoption massive par le grand public, imposent rapidement ces nouvelles fonctionnalités, les ‘Large Language Models’ ou LLM sur le devant de la scène.
Aujourd’hui, les LLM se concentrent sur l’amélioration du raisonnement et la planification d’actions complexes avec les Agents autonomes.
Pour les entreprises, l’IA générative offre trois grands types d’usages :
- l’assistance aux collaborateurs dans leurs tâches quotidiennes,
- la valorisation des données non structurées (via le Retrieval-Augmented Generation ou RAG),
- l’automatisation de tâches complexes grâce à des agents autonomes.
Mais l’évolution ne s’arrête pas là. L’IA générative est désormais multi-modale : elle peut comprendre et produire du texte, des images, des sons et des vidéos, ouvrant de nouvelles perspectives dans presque tous les domaines d’activité.
Spécificités de l’IA Générative pour l’entreprise
Une fois précisées les technologies en présence, l’IA prédictive avec le Machine Learning et le Deep Learning d’un côté et l’IA Générative de l’autre, intéressons-nous à ce qui différencie ses approches dans le contexte de l’entreprise.
Des compétences techniques distinctes
Dans un projet d’IA prédictive le cycle comprend plusieurs étapes bien définies : collecte et préparation des données, sélection de l’algorithme pertinent, entraînement et ajustement des hyperparamètres, déploiement et suivi des performances. Ces projets mobilisent principalement des experts techniques tels que des ingénieurs data et des data scientistes.
À l’inverse, un projet basé sur l’IA générative repose sur des modèles pré-entraînés les ‘Large Language Models’, dont l’entraînement initial a été réalisé par des fournisseurs spécialisés. Le rôle de l’entreprise se limite alors à assembler des briques technologiques existantes : LLM, bases vectorielles, frameworks agentiques, etc. Ce travail demande des compétences classiques en ingénierie IT, avec une expertise spécifique dans l’utilisation et l’intégration des LLM.
Notons que dans certains cas, très spécifiques, il est souhaitable d’affiner le modèle de langage. Mais en raison des coûts élevés liés à l’entraînement, aux besoins de ressources de calcul, aux volumes massifs de données, ce processus reste en dehors du périmètre de la plupart des entreprises.
Des interlocuteurs différents
Les projets de d’IA prédictive mobilisent des équipes techniques pointues, mêlant experts en data science et spécialistes métier. Ils se déroulent sur plusieurs mois et nécessitent souvent une intégration avec le système d’information (SI) de l’entreprise. De ce fait, ces projets sont généralement pilotés par la direction informatique.
En revanche, un projet d’IA générative s’appuie sur des composants techniques en cours de standardisation et nécessite une collaboration étroite avec les équipes métier pour définir les besoins. Lorsque des données internes de l’entreprise sont utilisées (par exemple, dans une architecture RAG), elles concernent souvent des services spécifiques et sont plus faciles à gérer. Par ailleurs, l’interaction avec les utilisateurs finaux est plus fréquente, notamment dans les phases de validation.
Ces projets, plus accessibles et agiles, sont donc souvent pilotés par les équipes métiers elles-mêmes.
Des tailles d’entreprise variées
Les projets de IA prédictive, en raison de leurs besoins en données massives et d’ infrastructures nécessaires, sont généralement réservés aux grandes entreprises, capables d’assumer les coûts et les contraintes techniques.
À l’inverse, les projets d’IA générative sont accessibles à des entreprises de toutes tailles. Ils ne nécessitent pas de volumes importants de données et couvrent une grande variété de cas d’usage. Cela les rend particulièrement attractifs pour les PME qui peuvent les adopter rapidement pour des besoins spécifiques.
Des outils adaptés aux contextes
Les outils utilisés dans les projets de IA prédictive sont souvent complexes et nécessitent une expertise technique approfondie. Ils sont difficiles à standardiser et à rendre accessibles à des non-spécialistes.
En revanche, l’IA générative bénéficie d’un écosystème d’outils en rapide expansion. De nombreux éditeurs proposent des solutions, disponibles soit en SaaS (via API), soit en open source pour des installations locales. Ces outils permettent, par exemple, de configurer rapidement des cas d’utilisation comme l’exploitation de documents via des interfaces graphiques intuitives (glisser-déposer).
Des plateformes dédiées commencent également à émerger pour industrialiser les projets d’IA générative à l’échelle de l’entreprise. Ces solutions intègrent des chaînes d’ingestion de données standardisées, des outils centralisés pour gérer les prompts, des mécanismes de contrôle qualité des réponses, et des systèmes d’orchestration d’agents.
IA Prédictive
(ML/DL)IA Générative Fonctionnalités Classification,
Prédiction,
RegroupementAnalyse de texte,
Traduction,
Résumé,
Génération de code,
Planification de tâches,Usages Prévisions financières,
Maintenance prédictive,
Reconnaissance d’images,
Moteurs de recommandationAide aux collaborateurs,
Valorisation des documents de l’entreprise
Automatisation de processus complexesCompétences Ingénieur Data, Data Scientiste Ingénieur IT,
Architecte SIOutillage Outils bas niveau spécialisés en IA Briques techniques standards Type
d’entrepriseGrande entreprise possédant de gros jeux de données Tous types d’entreprises Pilotage des projets Direction informatique Directions métiers Conclusion
Alors que l’IA prédictive s’appuie sur des processus techniques complexes nécessitant des données massives et des expertises pointues, l’IA générative se distingue par son accessibilité, sa modularité, et son potentiel d’adoption rapide, même pour les petites et moyennes entreprises.
Cette démocratisation des technologies de l’IA Générative ouvre un large éventail de cas d’usage, notamment
- L’assistance performante aux collaborateurs dans leurs tâches quotidiennes.
- La valorisation accrue des documents de l’entreprise, très souvent sous-exploités (texte, PDF, vidéo, e-mail).
- L’automatisation de tâches complexes grâce à des agents autonomes intelligents.
De plus, grâce à des outils en constante évolution et des plateformes de plus en plus standardisées, les entreprises peuvent désormais intégrer l’IA générative à leurs processus avec des efforts techniques et financiers maîtrisés.
Dans un contexte où l’agilité et l’innovation sont des leviers clés de compétitivité, l’IA générative représente une opportunité stratégique pour toutes les organisations souhaitant exploiter les bénéfices de l’intelligence artificielle, quelle que soit leur taille ou leur secteur d’activité.
n.b. :
Dans un prochain article, je traiterai de la pertinence et des modalités de la mise en place d’une plateforme technique dédiée à l’IA Générative dans l’entreprise en 2025.